Ça chauffe !
5 août 2024Surchauffe générale.
25 août 2024Après les ascensions vers le Nemrut Dagi, épuisantes, sous le poids des degrés, les jours qui suivent vont s’avérer également éprouvants. Certains raidillons m’obligent à puiser quelque peu dans mes réserves. Je fais néanmoins en sorte d’éviter la surchauffe en m’hydratant régulièrement et abondamment. Seulement, dès son apparition, le soleil fait dare-dare grimper le thermomètre.
Malgré la canicule, j’aperçois de nombreuses femmes qui travaillent dans les champs. Cueillette de tomates, concombres, piments, occupent de nombreuses personnes. En les voyant ainsi, je ne peux que déplorer l’existence d’une extrême rudesse pour ces gens qui passent ainsi une vie sans connaître loisirs, bien-être et possèdent un quotidien fait uniquement de rudesse, douleurs…et très peu de moments de douceur.
Certains tentent de me mettre en garde concernant l’Iran sans toutefois être très clairs au niveau de leurs explications.
Des piments sèchent sur le sol comme le faisaient, il y a peu, les abricots. La couleur rouge s’est substituée à l’orange.
J’aperçois quelques tentes. Sous l’une d’entre elles, aux côtés remontés, plusieurs hommes et femmes entourés d’une ribambelle de joyeux gamins sont installés sur des tapis. Ils me hèlent pour m’inviter à prendre un thé.
Je m’approche, me déchausse et je m’installe parmi eux sur un des tapis qui recouvrent le sol. Un jeune connait quelques mots d’anglais mais les gestes et les regards sont assez explicites pour saisir quelques bribes consistantes de leurs paroles. Ce sont des gitans qui font la saison des tomates. Ils iront ensuite ailleurs en fonction des récoltes.
Je poursuis vers Diyarbakir où je ne fais que passer. Lors d’un arrêt, un gamin s’intéresse de manière très soutenue à mon compteur kilométrique. Ayant néanmoins remarqué que je l’observe, le jeune garçon cesse de manipuler l’objet.
En soirée, je dégote un bâtiment abandonné à l’arrière d’une station-service. J’y accroche mon hamac à deux solides piliers. Me voici squatteur ! Un robinet avec un long tuyau me permet même d’avoir ce soir une douche délicieusement rafraichissante.
Le jour suivant, je m’arrête quelques kilomètres avant d’atteindre Mardin. Un peu à l’écart de la ville, j’accroche cette fois mon hamac à deux arbres esseulés sur une colline. La distance qui les sépare est limite pour la longueur de mes sangles mais je parviens à passer une excellente nuit, adoucie par une légère brise bienvenue.
Le matin suivant, je n’ai malheureusement pas la possibilité de visiter la forteresse de Mardin qui domine la région du sommet de sa colline. En ce moment elle est occupée par des militaires qui ont, me dit-on, installé des radars en raison des tensions régionales.
Je me trouve en ville au moment le plus chaud de la journée. Je ne m’y éternise pas, en me disant que j’aurais peut-être ultérieurement une nouvelle opportunité de visite. Je me dirige donc vers la frontière syrienne que je vais longer pendant quelques jours.
Dans une gargote on me signale qu’il y a peu, de l’autre côté de la frontière, Bachar El Assad a fait larguer quelques bombes. Cela explique les nuages de fumée que je voyais monter au loin.
Mes interlocuteurs m’invitent à partager leur repas. Salade et Pide sont au menu avec des boissons fraiches et quelques thés, bien évidemment.
Je roule à présent avec sur ma droite, un mur et du barbelé qui me séparent de la Syrie voisine. J’ai en revanche, le sentiment d’être face à de grandes flammes tant l’air est brulant. Le thermomètre affiche 45°. Soudain un véhicule s’arrête et le chauffeur en descend une bouteille de jus de fruit dans une main et une glace qui a sérieusement commencé à fondre dans l’autre. Il venait probablement d’acheter cela pour lui et il n’a pourtant nullement hésité à me les offrir.
La population me précise bien qu’ici on est Kurde et non Turc.
Le soir venu, j’accroche mon hamac proche d’un dépôt de camions. Alors que je viens de manger et commence juste à lire, un homme arrive muni d’une assiette qu’il me tend, son faciès illuminé d’un sourire. Il y a là des figues, des morceaux de melons, des prunes, le tout bien frais. Un réel bonheur totalement inespéré.
Combien de fois les gens me surprennent par leur générosité si naturelle. Ici, on ne se force pas pour offrir à boire ou à manger, cela coule de source. Je m’interroge souvent afin de savoir à quel moment les pays occidentaux ont perdus cette spontanéité dans l’accueil. Cela est tellement beau et rassurant. Je me sens partout en totale confiance. Je peux laisser mon vélo sans m’inquiéter. Confiance, gentillesse, générosité…que cela fait du bien !
Puis j’atteins Cizre sous les rayons brulants de l’astre lumineux. Dans une ruelle, deux jeunes hommes entrent dans un local qui me semble être un café. J’y pénètre à mon tour pour commander un café et une boisson fraiche. La jeune fille qui m’a servi m’explique en souriant que ce lieu est réservé aux étudiants tout en s’empressant de me rassurer en m’invitant à rester. Nous rions du malentendu. Avec trois autres jeunes nous devisons sur nos visions du monde et nos quotidiens respectifs. Les consommations me sont une nouvelle fois offertes.
Me voilà ensuite roulant vers la frontière irakienne. Une double file de camions, longue de plus de 10 kilomètres, précède un grand stationnement sur lequel se trouvent entre 2000 et 3000 poids-lourds. Il y a un supermarché et un restaurant. J’accroche mon hamac sur place pour ma dernière nuit Turque.
Le lendemain je franchis la frontière Irakienne et me dirige vers Zakho, ville où je me trouve à présent et dont je vous parlerai la prochaine fois.