Une générosité spontanée.
14 août 2024Soudainement, millionnaire.
3 septembre 2024Mon entrée dans le Kurdistan irakien m’est facilitée par Ferhat, un jeune Kurde qui m’aide à la compréhension du questionnaire et en s’avérant un excellent interprète. Allégé de 72 dollars, soit le prix du visa, j’entre enfin dans mon 123ème pays. A la station-service voisine, Ferhat refuse d’être invité et tient à m’offrir lui-même, une boisson rafraichissante. Le Kurdistan irakien m’accueille les bras ouverts.
Le parcours étant plat. Les stationnements pour poids-lourds sont en nombre. Comme j’ai pu le vérifier côté turc, ce poste frontière est un lieu incontournable pour le passage des marchandises. J’effectue aisément les quelques kilomètres qui me séparent de Zakho, première ville du parcours où j’aspire trouver un lieu pour me rafraichir. Avant toute chose je dois dénicher un distributeur afin de retirer un peu d’argent.
Les choses vont dès lors se compliquer car cela s’avère impossible. Certains distributeurs sont en panne et d’autres me refusent le retrait. Je commence à m’inquiéter et tourne en vain d’un lieu à un autre sous une chaleur accablante. Les gens m’envoient d’une banque à une autre, sans aucun succès.
Dans une banque climatisée, je n’ai pas plus de réussite mais j’en profite pour contacter ma sœur qui se renseigne auprès de ma banque afin de savoir si celle-ci ne bloque pas le retrait pour des raisons de sécurité. Après quelques appels, elle me précise qu’il n’en est rien. Je sors, quelque peu dépité, lorsque la banquière surgit à son tour et me donne en espèce l’équivalent d’une nuit d’hôtel. Je la remercie chaleureusement en lui disant qu’il m’étonnerait fort que les banquiers français agissent de la sorte. J’avais déjà eu une telle surprise lors de mon dernier passage en Malaisie.
Je file aussitôt dans un petit hôtel où je peux enfin me rafraichir. Puis je ressors en quête d’une solution à mon problème. Finalement, à force de persévérance, je dégote un distributeur qui fonctionne…Ouf !
Du coup, je décide de rester ici quelques jours afin de poursuivre mes démarches en quête de visas et d’informations pour la suite du parcours.
Les gens ne marchent dans les rues que d’un côté de la chaussée ; celle où se trouve l’ombre, bien entendu. En soirée, dès que le soleil se cache, tout s’anime. Je vois essentiellement des hommes. Au premier abord je voyais la plupart des femmes vêtues de noir, mais peu à peu j’en aperçois, généralement plus jeunes, habillées comme une occidentale, sans toutefois montrer leurs « gambettes ».
On m’apostrophe avec curiosité tout en m’invitant à boire un thé. Au Bazar, les gens déambulent tranquillement. Il n’y a pas foule. Comme en Turquie, Je suis abasourdi par le nombre de boutiques de téléphones portables. Il y en a pour tous les goûts et de toutes les marques. Les marchands de cigarettes ne sont pas en reste. En Turquie déjà les gens fumaient beaucoup. Ici également. Le prix des cigarettes n’a rien de comparable avec les prix français.
Au terme de cette première prise de contact rassurante avec ce nouveau pays, je reprends ma route en direction de Dahuk. Les degrés pèsent sur chaque coup de pédale. Je m’arrête manger dans une gargote de bord de route, profitant d’échapper ainsi au soleil. Je vide plusieurs petites bouteilles d’eau fraiche, conscient que boire frais n’est pas l’idéal car cela fatigue l’organisme. Pourtant, qu’est-ce que ça fait du bien ! Puis au moment de régler la note, le gérant refuse le paiement en me disant qu’il est heureux de me l’offrir, ce qui ne fait aucun doute, vu son large sourire.
Je passe une journée à Dahuk, mais je dois avouer que la saison n’est pas propice aux visites. Il fait trop chaud pour cela et je me contente donc de partager des moments avec les gens en sirotant des thés et observant le mouvement.
Puis je file vers Mossoul. Il fait 46° à l’ombre, ombre que je ne trouve malheureusement pas. Le guidon du vélo est lui-même brulant. Le contenu de mes sacoches également, au point que je suis inquiet pour mon ordinateur portable et mon smartphone sur lequel apparait régulièrement un message d’avertissement concernant sa surchauffe.
Je constate que je supporte moins les fortes chaleurs qu’il y a quelques années…il ne fait pas bon vieillir ! Je me demande comment je parvenais à rouler au Kazakhstan avec des températures de 57° à l’ombre ?
A quelques encablures de Mossoul, le checkpoint policier ne me permet pas de poursuivre et m’oblige à un demi-tour qui ne m’enchante guère. Pour pénétrer plus en avant dans le territoire irakien il me faut un autre visa.
Devant cet obstacle je décide donc de rester en territoire kurde afin d’aller à Erbil avec l’espoir d’y dégoter mon visa iranien.
Je passe la nuit suivante à Ain Sifni. Je remarque en arrivant, un bâtiment désaffecté. Je vais acheter de l’eau fraîche et quelques fruits dans le petit commerce voisin. Une nouvelle fois, au moment de payer le gérant refuse mon argent et m’offre le tout en y rajoutant une boisson supplémentaire.
Il est clair que mes repères d’occidental sont quelques peu bouleversés. Ici, les banquiers vous paient l’hôtel, les commerçants vous offrent vos provisions et les restaurateurs les repas. Certes cela n’est pas systématique, mais il y a toujours un geste de générosité très touchant et totalement déroutant. Que cela fait du bien ! Quelles belles leçons de générosité !
Installé dans mon hamac, le commerçant voisin qui m’a déjà offert boissons et fruits, arrive après la fermeture de sa boutique et m’apporte une grande poche avec conserves, pâtes, boissons fraîches…J’en reste presque sans voix. Comment cet homme que je ne connais pas, avec lequel je ne peux échanger que des gestes, et des sourires, peut m’offrir autant ? Le plus incroyable est que cela est loin d’être un acte isolé.
Mon sommeil sera quasi nul tant la chaleur nocturne est étouffante. Mais mon cœur est quant à lui empli de félicité devant l’accueil que me réserve la population.
Le lendemain, le bitume est loin de faire preuve d’autant d’hospitalité. Il me restitue la chaleur du soleil en démultipliant son énergie. Heureusement, à deux reprises des véhicules s’arrêtent pour me tendre des bouteilles d’eau plus que bienvenues.
Lorsque j’arrive à Erbil, je me dirige aussitôt vers la citadelle qui domine majestueusement la ville. Après avoir tourné dans la zone, je trouve un hébergement au prix abordable qui me permettra d’effectuer toutes les démarches pour la suite du parcours.
Dans un premier temps, il s’agit de récupérer le visa iranien. Cela s’avère beaucoup plus facile que je ne le pensais et surtout très rapide.
Je reste en ville un peu plus longtemps que prévu car une bonne diarrhée vient me perturber. Sans doute est-elle la conséquence d’un manque de récupération dû à la chaleur cumulée à l’alternance d’eau chaude et d’eau fraîche dès que j’en ai la possibilité.
Après un peu de repos cela n’est plus qu’un mauvais souvenir et je m’apprête à présent à faire route vers la frontière.
Encore quelques jours au Kurdistan irakien avant de découvrir un 124ème pays, dont la réputation d’hospitalité est constamment vantée par les voyageurs au long cours.