
Épilogue Saoudien.
4 avril 2025
L’âpreté des grandes métropoles.
27 avril 2025Le bateau qui me mène d’Arabie Saoudite en Egypte, emporte, en son « ventre », de nombreux poids-lourds dont la grande majorité sont Egyptiens. J’observe l’embarquement de ceux-ci, impressionné par la dextérité des chauffeurs qui parviennent à glisser leur mastodonte sans quasiment la moindre marge de manœuvre.
Certains passagers optent pour des cabines avec couchettes et d’autres, comme moi, passent la nuit assis sur un siège légèrement inclinable. Puis tout à coup, plusieurs chauffeurs se lèvent et déroulent des matelas entre les sièges. Je regrette alors de ne pas avoir amené mon matelas gonflable et mon duvet.
Pendant la nuit, j’avale quelques thés, prétexte pour me dégourdir les jambes.
Au lever du jour, le bateau accoste au port de Safaga. Me voici donc dorénavant sur le sol Egyptien. Avant de m’élancer sur les routes, je décide de rester deux jours ici, afin de m’occuper du change de monnaie, de l’achat d’une nouvelle carte sim et de la visite de la ville.
Puis, alors que je m’apprête à bouger, un vent violent se lève. Il va souffler pendant plusieurs jours. Je tente de rouler mais celui-ci est vraiment très puissant. Il me cloue littéralement sur place. Non seulement je n’avance pas mais en plus quelques rafales me dévient de ma trajectoire et m’envoient frôler des voitures qui me klaxonnent. N’étant pas pressé, je retourne en ville pour attendre une accalmie prévue dans trois jours. Au cours de cette période, le port est d’ailleurs fermé.
Sur le bord de mer, quelques bâtiments sont abandonnés. D’autres en construction paraissent également délaissés. Un homme m’explique qu’au Sud de la ville, ils le sont en raison de l’agrandissement du port. Mais plus au nord, c’est l’armée qui a réquisitionné des terrains.
Au troisième matin, le vent parait s’être vaguement apaisé. J’en profite pour quitter Safaga. Moins vigoureux que ces dernières jours, Eole n’est tout de même pas vraiment endormi. Il vient du nord et je l’ai en pleine face. Je multiplie les petites pauses. Mes jambes sont endolories. Il n’y a aucun moment de répit.
Mon compteur kilométrique tourne lentement. Hormis du sable sur lequel volent quelques sacs plastiques, il n’y a pas grand-chose à voir. Je bénéficie parfois d’une timide vue sur la mer.
Puis j’aperçois un grand bâtiment en construction dont les travaux paraissent suspendus. J’y vais pour me protéger du vent lorsqu’un vieil homme surgit de nulle part. Il vit à l’étage dans des conditions très précaires afin de surveiller l’endroit. Il est originaire de Louxor où demeure encore sa famille.
J’atteins ensuite Hurghada, ville touristique dans laquelle je ne croise pratiquement aucun étranger. Juste deux jeunes Chinoises, un couple de russes et une Anglaise. Alors que je n’ai pas vraiment l’intention de m’éterniser sur les lieux, j’aperçois un hôtel en travaux. Après un bref conciliabule, le personnel m’y propose une chambre au prix imbattable. Les travaux ne sont pas achevés mais cela m’importe peu. Lorsqu’ils le seront, les tarifs suivront certainement.
Dans cette ville touristique, les boutiques en tout genre fleurissent. J’en profite pour amener mon ordinateur portable afin de voir s’il est possible de changer la batterie qui ne tient plus du tout la charge. Aussitôt demandé, aussitôt fait. Le jeune réparateur me montre amusé, l’état de la vieille qui est toute gondolée. Sans doute a-t-elle souffert du froid (-19°) en Géorgie et de la chaleur (50°) en Irak.
Voilà une bonne chose de faite ! En revanche, il est impossible de changer celle de mon téléphone qui doit être dans le même état. J’espère pouvoir m’en occuper dans la capitale.
Je déambule dans certaines rues. A de nombreuses reprises, je ne peux accéder à la plage car celles-ci sont privatisées par les grands hôtels.
Je passe dans le marché aux poissons. Les étals y sont fournis par du poisson fraichement pêché.
Proche de là, j’accède à la Marina où je trouve finalement de nombreux groupes de touristes effectuant des excursions en bateau. Les boutiques ne ressemblent guère à celles du quartier où je séjourne. Ici tout est plus chic et les tarifs s’en ressentent. J’entends parler français, portugais, russe… Je prends quelques photos et retourne dans un monde plus approprié à ma façon de voyager.
Lorsque je reprends la route en direction du nord, je suis loin d’imaginer ce qui m’attend. Comme de coutume depuis mon arrivée en Egypte, je lutte contre le vent. Mon compteur kilométrique ne tourne pas vite mais le principal est justement qu’il tourne.
J’aperçois sur ma droite les différents tons du bleu de la mer Rouge. Je me réjouis à l’idée de planter ma tente dans les prochains jours avec cette eau en guise de terrasse.
Puis j’arrive à un check point de la police égyptienne.
Tout va dès lors basculer. Les policiers me stoppent et pendant plus de deux heures disent qu’il ne m’est pas autorisé de poursuivre à vélo pour des raisons de sécurité. Ils tentent de me convaincre en vain qu’il est impossible de traverser le désert à vélo et qu’ils se soucient de la sécurité des touristes.
Pendant deux bonnes heures je m’efforce de leur expliquer que cette partie m’est tout à fait abordable, mais rien n’y fait. A la fin, je ne parviens plus trop à conserver mon calme et leur lance qu’il s’agit là d’un manque de liberté fragrant. Rien n’y fait. Ils arrêtent un bus et « m’expédient » au Caire. Tentant une dernière chance, je leur lâche qu’il est hors de question pour moi de payer un quelconque transport. Ils m’assurent aussitôt que je n’aurais rien à débourser venant ainsi anéantir ma dernière espérance.
Ils me disent qu’ils font cela pour ne pas gâcher mon voyage et je leur explique que c’est justement ce qu’ils font en m’ôtant le plaisir de traverser des lieux naturels non touristiques.
Je suis furieux et totalement impuissant.
Je me retrouve dès lors dans un bus qui arrive en pleine nuit au Caire. Je dois ensuite trouver un hébergement bon marché et donc rouler en ville de nuit, chose que je ne fais jamais.
Je dégote finalement un endroit correct après en avoir visité un bien douteux.
Mes premiers pas au Caire font en revanche apparaitre un côté du voyage que je déteste. Je dois constamment être sur mes gardes car on tente toujours de me faire payer plus cher ou de m’arnaquer. Il me faut systématiquement demander bien clairement le prix et malgré cela, on me demande parfois plus cher, trouvant un prétexte quelconque.
Quel contraste avec l’Iran et l’Irak ! Comment des populations, pourtant pas si éloignées géographiquement, peuvent-elles s’avérer si différentes au niveau mentalité ?
Est-ce en raison du tourisme qui en Egypte est bien plus développé ?
Peut-être.
Certes, je ne veux pas généraliser, mais il est clair que je pense très fort et avec nostalgie à mon passage en Irak et en Iran, deux pays uniques en termes de générosité et d’accueil.
Je vais néanmoins devoir séjourner quelques temps au Caire afin d’y recevoir du matériel.
En déambulant dans le quartier où je séjourne, je suis effaré par le niveau de saleté. Les détritus jonchent le sol. Par endroit il s’agit carrément de mini-décharges qui font le bonheur des chats et chiens errants.
Difficile en voyant cela de conserver une dose d’optimisme quant à l’avenir de notre planète. L’Homme qui se prétend l’espèce supérieure, est l’unique être vivant à s’acharner de la sorte à la destruction de son lieu de vie. Notre espèce est bien la seule à montrer autant d’ingéniosité pour mettre au point des outils autodestructeurs.
La fin de l’espèce humaine sera probablement la salvation de la planète.
Au cours des prochains jours, quelques visites historiques vont occuper mon temps. J’espère parvenir à faire abstraction de toutes les sollicitations, pas toujours bien intentionnées. Je dois pour cela prendre du recul concernant ces comportements afin de ne pas me fermer moi-même à tout contact, par mauvais réflexe.
Fort heureusement pour moi, quelques belles personnes me donnent espoir, comme c’est le cas dans la gargote voisine qui me fait office de petite cantine.

































