En tête à tête avec la Caspienne.
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Me voici depuis quelques heures sur le sol arménien. Ces derniers jours en terre iranienne furent toujours ponctués de gestes généreux de la part d’une population qui aura grandement marqué ma vie de voyageur. Jamais je n’ai connu telle constance dans la chaleur de l’accueil. Jamais on ne m’a autant donné de fruits, de nourriture, on n’a autant partagé de thés avec moi. Combien de fois, au moment de payer mes quelques provisions, le commerçant refusait le paiement.

Les Iraniens ont tatoué mon cœur de leur humanité. C’est sans doute pour cela qu’au moment de passer la frontière je me suis retourné pour un ultime coup d’œil, sentant quelques larmes sur mes joues.

Mais si la traversée de l’Iran fut jalonnée de bienveillance à mon égard et si pour un voyageur ce n’est que du bonheur, j’ai aussi pu recueillir une multitude de témoignages d’une jeunesse avide de changements. Les quelques fois où j’ai été hébergé, la parole se libérait. Le poids de la religion se fait de plus en plus insupportable pour de nombreux jeunes désireux de pouvoir partager des moments festifs sans avoir à se cacher. Vont-ils y parvenir ? L’avenir le dira, mais cela ne doit dépendre que d’eux-mêmes.

Si le chemin d’un changement est probablement long et scabreux, il est néanmoins amorcé. Des jeunes femmes se promenant sans voile malgré la loi sur son port obligatoire, font preuve de bravoure en défiant les autorités. De nombreux jeunes hommes, plus discrets, partagent leurs aspirations. Un jour, un homme m’a dit, admiratif, en désignant deux filles cheveux aux vents : « tu vois, ces filles ? Elles sont courageuses ! J’espère et je pense que mon pays va changer ». Plus tard dans la conversation il m’a également parlé d’opposants au régime des Mollahs qui sont « éliminés » ou de la corruption qui gangrène le pays. Lorsque je lui ai parlé des nombreux travaux de constructions en cours, il m’a affirmé qu’un système mafieux contrôlait tout cela.

De nombreuses personnes travaillent pour des salaires mensuels avoisinant les 200 euros. Plusieurs m’ont dit ne presque plus consommer de viande car ils n’en ont plus les moyens.

Pour ces gens, voyager est juste irréalisable.

Alors, en quittant ce pays, c’est aussi à eux que je pense, en espérant qu’ils puissent cheminer en paix vers une société plus juste, plus libre et en souhaitant qu’ils ne perdent jamais cette beauté intérieure qui en fait un Peuple unique.

Quant à moi, j’ai dû forcer sur les pédales afin de parvenir à la frontière arménienne avec le peu d’argent qu’il me restait. En cela, les dons de nourriture quasi quotidiens m’aidaient beaucoup.

Après une dernière nuit sur les bords de la Caspienne en compagnie d’un gentil « toutou » qui ne m’a pas quitté de la soirée, j’entame une longue montée sur une route sinueuse longeant la frontière azerbaïdjanaise.

A Ardabil je rencontre enfin Raphaël, un français qui voyage à moto après des années de vélo. Nous étions en contact depuis longtemps via internet, notamment en période de covid où nous étions au même moment en Amérique latine. Mais jusqu’alors, nous ne nous étions jamais croisés. Nous passons une journée de repos à discuter de nos parcours, projets et rêves. Nous effectuons quelques balades au rythme de nos conversations. Après un ultime petit-déjeuner je reprends ma route vers le nord alors que Raphaël va poursuivre dans la direction opposée avec le souhait de parcourir la péninsule arabique. Il est néanmoins probable que nos routes se croisent à nouveau.

Puis les montées succèdent aux descentes et vice versa jusqu’à la frontière arménienne. Le temps souvent couvert ne valorise malheureusement pas des paysages montagneux aux roches souvent colorées. Sur le bord des routes et chemins des tas de pommes attendent les acheteurs. La récolte est bonne et mes sacoches s’alourdissent constamment de quelques fruits bienvenus.

La dernière nuit avant la frontière est presque terrifiante lorsque j’observe de l’autre côté le mur montagneux qui m’attend. Nul doute, ça va grimper !

Le temps s’est bien rafraichi et je vais devoir bientôt adopter ma tenue hivernale.