Douceur.
10 janvier 2025Suite à mes multiples crevaisons et à un examen plus attentif de ma roue arrière, je m’aperçois que la jante se fends de l’intérieur, occasionnant ainsi de petites entailles dans mes chambres à air. Me voici donc bloqué. En faire monter une en France pour ensuite me l’expédier prendrais trop de temps, dans la mesure ou ma date limite de séjour en Turquie arrive bientôt à échéance. Je dois donc trouver un moyen de réparer ici-même. Je dois pour cela, prendre un bus jusqu’à la ville voisine de Van où se trouvent plusieurs boutiques de cycles.
Mon choix se porte sur « Sanat Bisiklet ». Là, une équipe très sympathique s’affaire à me dépanner, m’assurant de la solidité de la nouvelle roue. J’espère qu’elle me permettra de tenir quelques mois sans embûche et ensuite, probablement, faudra-t-il que je m’en fasse venir une autre plus adaptée. Néanmoins, la multiplication de ce type d’incident m’interpelle. Certes, j’ai un chargement important, mais ces roues peuvent supporter jusqu’à 180 kilos. En lisant un commentaire, François (Cycles Itinérances), me met la puce à l’oreille. Il est en effet possible que j’exagère au niveau du gonflage de mes roues. Ce surplus de pression « élargit » les jantes qui se fendent donc dans un premier temps au niveau de la paroi interne. Je vais donc tenir compte de cela à l’avenir et tenter simultanément, d’alléger un peu le contenu de mes bagages. Bien que la saison ne s’y prête pas encore, mes futures destinations devraient me le permettre. Bref, de bonnes résolutions pour cette nouvelle année.
A Van, je passe beaucoup de temps dans des cafés où se retrouve la jeunesse locale. L’ambiance y est des plus agréable avec un agréable fond musical. Je visite les ruines du château, mais je consacre l’essentiel de mon temps à lire, écrire un peu, beaucoup rêver. Je scrute la mappemonde en m’efforçant de discerner où paraissent m’orienter les battements de mon cœur.
En plus de disposer d’une nouvelle roue, mon vélo a bénéficié d’une petite révision opportune.
Je parviens même à éliminer quelques centaines de grammes de chargement…venant de ma part, cela relève de l’exploit.
Alors que je me lève avec l’intention de quitter Van, je découvre, qu’une bonne couche de neige recouvre abondamment la chaussée et coiffe gracieusement les toitures et les véhicules. Les engins n’ont pas encore dégagé la route. Je consulte les prévisions météo qui annoncent du soleil pour les prochains jours. Je décide donc de décaler mon départ au lendemain matin.
Lorsqu’enfin je redémarre, le froid sec se fait bien sentir mais le soleil atténue ses piqures. Je débute par une ascension de quelques kilomètres, entouré par les sommets enneigés qu’enluminent les rayons de soleil. Il en résulte une atmosphère paisible au cœur d’un écrin d’une grande beauté.
Dans cette région kurde, je croise de nombreux convois de l’armée turque.
Une bonne descente me mène ensuite dans la bourgade de Güzelsu dominée par son château, lui-même perché sur un éperon rocheux. Je prends quelques photos lorsqu’au moment de partir en quête d’un lieu où passer la nuit, un homme m’invite à prendre un thé puis à venir passer la nuit à son domicile tout proche de là. Murat, son épouse et leurs quatre enfants sont à mes petits soins. Le poêle à bois réchauffe délicieusement la maison. Nous buvons quelques thés accompagnés d’une bonne variété de douceurs. Vient ensuite le repas, élaboré essentiellement avec des produits naturels de leur jardin. La famille est adorable. En fin de soirée, je tombe de sommeil et m’endors rapidement après m’être couché.
Au matin, alors que les deux plus jeunes enfants vont à l’école, je partage le petit-déjeuner avec le reste de la famille. Au moment de partir mon pneu arrière est à plat. Je retire une grosse limaille du pneu et repars sur la route. Comme hier, j’ai d’abord droit à plusieurs kilomètres de montée avant de passer dans un tunnel ouvert à la circulation depuis seulement trois mois.
Le soleil se réfléchit sur la couche neigeuse au cœur de laquelle se distinguent des empreintes d’animaux. Lapins, renards et même loups sont dans la zone. J’aperçois un renard gambadant joyeusement au loin. Lorsqu’il m’aperçoit, celui-ci déguerpit à grande vitesse et disparait aussitôt de ma vue.
Quelques haltes dans des gargotes à thé me permettent de réchauffer mes mains. Un camion roulant en sens inverse s’arrête. Le chauffeur m’exhibe son thermos et m’invite également à me réchauffer.
La frontière iranienne et sa promesse d’un nouvel accueil exceptionnel, n’est plus qu’à un jour de route.